soit dit en passant
Parce que l’heure est venue de remplacer un homme à la direction du Palais de Tokyo, à Paris, et qu’un jury ad hoc auditionnera le 29 mai, la ville bruisse de rumeurs sur la personnalité du successeur. Une femme ? Deux hommes ? Un homme et une femme ? Comme toujours, l’attention se porte sur le casting, plutôt que sur la fiche de poste. La fin du mandat de Jean de Loisy, marqué par des succès et des ratés, invite pourtant à repenser l’institution avant de la confier à un merle blanc (et/ou une hirondelle, certainement pas un coq !) qui sera atypique mais pas outsider, aura un ancrage français doublé d’une stature internationale, sera visionnaire mais n’occultera pas l’Histoire, bénéficiera des appuis politiques nécessaires mais aussi des financements privés indispensables, sera charismatique mais sans ego, aura l’esprit d’équipe mais l’âme d’un timonier, sera capable de monter au front sans chercher le conflit…
Cela fera bientôt 18 ans que l’art contemporain jouit d’un vaste écrin dans ce Palais qui jouxte le musée national d’Art moderne de la Ville de Paris. Or, l’âge adulte a ses exigences et depuis, quelque temps, le Palais fait sa crise de croissance. Les titres des « saisons », quoique simples – « Sensible », « Discorde » – cachent parfois un flou artistique. Certaines expositions auront marqué par leur inutilité autre que médiatique – cf. Michel Houellebecq. D’autres par leur gigantisme inopportun – cf. Camille Henrot. Quand ce n’est pas la main trop visible de certains mécènes qui fait tiquer...
Pour réussir, le prochain titulaire du poste devra tirer les leçons de ces déceptions et s’inspirer franchement des réussites. Pour ne prendre que quelques exemples : oser inviter un grand ancien n’est pas du passéisme – cf. l’exposition de Julio Le Parc. Oser afficher une lecture politique de la société n’est pas de l’activisme – cf. Neïl Beloufa. Rêver en grand format n’est pas du nombrilisme – cf. Tomás Saraceno. Oser regarder hors du champ de l’art n’est pas une fuite – cf. « Le Bord des mondes ».
Comment désormais redéfinir le lieu ? Faut-il privilégier l’émergence, terrain quadrillé par de nombreux acteurs privés comme la Fondation Ricard ou Lafayette Anticipations ? Jouer à fond la carte de l’international, sur laquelle surfera sans doute la Pinault Collection à la Bourse de commerce ? Ou tenir compte du désarroi des artistes français, notamment en milieu de carrière, à laquelle aucune institution, à commencer par Beaubourg, n’a su répondre ? Faut-il d’ailleurs que le Palais devienne un satellite du Centre Pompidou, tel que l’envisageait en 2007 le projet défendu par Catherine Grenier ?
Reste une certitude : le, la ou les futur(e)s président(e)s devra(ont) montrer l’exemple et ne pas céder à la tentation de préparer la suite de leur carrière en acceptant les missions extérieures au risque de l’éparpillement… À l’heure où le marché met la création à l’épreuve, la ou les personnes qui assumeront une fonction publique devront s’y dévouer corps et âme.