Par un arrêt du 5 octobre 2018, le Conseil d’État vient d’apporter une précision majeure dans la détermination de l’intérêt public des monuments historiques lors de travaux envisagés sur ceux-ci. En 2013, un célèbre horloger établi dans l’hôtel de Villemaré, place Vendôme à Paris, a souhaité faire déposer un lit de pierre du soubassement et de la façade (bâtis entre 1699 et 1716), afin d’abaisser les allèges de ses vitrines pour les ramener au niveau qu’elles avaient en 1862, date du classement de l’immeuble. Un projet a été soumis pour autorisation à l’administration, qui l’a refusé. L’horloger a alors saisi le juge administratif, qui a estimé que l’appréciation des travaux ne devait pas être effectuée au regard de « l’état de l’immeuble à la date de son classement », mais de « l’intérêt public, au point de vue de l’histoire ou de l’art ». Cela revient à dire que l’intérêt public n’est pas cristallisé à l’état du bâti lors de la date de son classement, mais peut prendre appui sur des éléments antérieurs plus significatifs. Aussi, « au regard des gravures réalisées par Jean-François Blondel en 1752 qui donnaient (...) la description la plus précise, complète et certaine de la place Vendôme à la date de son achèvement », les travaux litigieux portaient atteinte à la présentation de l’immeuble et à l’ordonnancement de la place voulus par Louis XIV et Jules Hardouin-Mansart. Espérons que les divers services du patrimoine se saisissent de cette nouvelle portée juridique et protectrice.