Quel questionnement a bien pu conduire Jean-Luc Moulène à délaisser progressivement la photographie pour s’investir dans la sculpture ? Il n’est pas abusif d’y voir l’un des bouleversements majeurs survenus sur la scène française en ce début de siècle, laissant perplexe plus d’un — il reste l’un des artistes les plus influents dans son approche prosaïque de la photo, avec une éthique sociale sans ambiguïté —, et dont il est encore tôt pour mesurer l’impact. Si les smartphones et les réseaux sociaux ont produit un séisme qui a déstabilisé le statut de la photographie et le rôle de l’artiste, Jean-Luc Moulène semble plutôt l’avoir pressenti en choisissant des modalités vernaculaires d’infiltration et de mise en circulation des images. Au Centre Pompidou à Paris, il distribue un journal gratuit, Quiconque, dont le titre paraît renseigner sur sa lecture de la situation de la photographie (sans aucune nostalgie…
Jean-Luc Moulène : Matérialisme des passions au Centre Pompidou
Comment expliquer le passage chez Jean-Luc Moulène de la photographie vers la troisième dimension ? Plutôt qu’une overdose de la culture Instagram, il faudra y voir un cheminement lié à sa passion des sciences et des objets paradoxaux. Faisant cohabiter le charnel et l’industriel dans une exposition majeure au Centre Pompidou, il instaure un dialogue entre les objets eux-mêmes, soulignant des échanges avec les philosophes du « réalisme spéculatif ». Décryptage.