« L'Histoire est à moi », tel est le libellé cette année du Printemps de Septembre à Toulouse conçu par Paul Ardenne. Ce dernier dialogue avec Jean-Paul Ameline, commissaire de l'exposition « Face à l'Histoire » en 1996 au Centre Pompidou, sur le rapport de l'artiste à l'Histoire.
R. A. Entre la Documenta, Manifesta, la Triennale et le Printemps de Septembre, l'histoire semble hanter les expositions d'art contemporain. Comment expliquez-vous cette résurgence ? Comment vous-mêmes intégrez-vous l'Histoire dans vos expositions ?
J.-P. A. Les Français ont mis du temps à rejoindre ce qui se faisait ailleurs. Aussi bien aux États-Unis qu'en Allemagne ou en Grande-Bretagne, la question de l'Histoire n'a jamais été exclue des arts plastiques ni par les artistes, ni par les institutions. Les gender studies ont mis du temps à venir en France. Les Allemands se sont toujours intéressés à leur propre Histoire. Pour Richter ou Immendorff, l'Histoire est une eau dans laquelle ils n'ont jamais cessé de baigner. En France, dans les années 1950-1960, le réalisme socialiste tel qu'il était défendu par le Parti communiste a servi de repoussoir. Cela a donné cours à un formalisme post-greenbergien, car le rapport à l'Histoire était associé à l'art engagé. Un artiste qui s'y intéresserait serait forcément un militant qui romprait avec son idéal d'artiste au nom de l'engagement. Quand j'ai proposé l'idée de « Face à l'Histoire » au Centre Pompidou, elle était difficile à faire passer malgré la tradition des « Paris-Berlin » et « Paris-Moscou ». Ce qui m'intéressait, c'est ce qui était arrivé aux artistes après la catastrophe de 1933, le triomphe de Staline et d'Hitler. Les artistes ont pris l'Histoire en pleine figure. Ce n'était pas la vocation de Picasso de faire Guernica. J'ai défendu l'idée d'un sujet qui parte de…