Anne Tronche est morte le 16 octobre, pendant une conférence sur l’art des années soixante. Un mot soudain lui manque. C’est fini. La vie est tranchée. Dans une école, là où passe le savoir ; dans une école d’art, là où s’éprouve la liberté.
Je lisais ses écrits dans Opus International bien avant de travailler avec elle de 1990 à 1993 à la délégation aux arts plastiques. Quelques rencontres comptent dans une vie, rares et substantielles. Anne Tronche était là depuis 1982, avait participé dès le début à l’embellie des années Lang et fut pour moi une conseillère et une amie. Elle m’apprit constamment sans autre magister que sa façon d’être et d’entretenir avec l’art une relation vitale.
Elle savait la valeur de ce qui ne se mesure pas et de ce qui dure, au-delà des effets de foires, des engouements de mode ou de la « futilité esthétique1 ». Tout en elle passait par une attention aux autres et le goût insatiable d’apprendre et de comprendre, pour partager, transmettre et aimer. La vie avait cette saveur d’une pensée et d’une action jamais dissociées ; d’une connaissance des êtres inscrivant dans une unité les œuvres créées et leurs créateurs ; d’un indispensable…