Au terme d'une difficile gestation, grevée par la promulgation de lois homophobes en juin 2013 et par la crise de Crimée en mars charriant une avalanche de pétitions et d'appels à boycott, la dixième édition de la Biennale européenne d'art contemporain Manifesta a finalement ouvert ses portes samedi 28 juin à Saint-Pétersbourg, en Russie. Une inauguration sans bruit ni fureur, sans même une seule affiche ni signalétique dans la ville. Comme si le fief de Vladimir Poutine, qui débourse pourtant la coquette somme de trois millions d'euros (sur un budget de 4,5 millions d'euros) ne l'accueillait qu'à contrecoeur. « Personne ne veut de Manifesta ici, reconnaît Kasper König, l'ancien directeur du musée Ludwig à Cologne et commissaire de cette édition. Seul Mikhaïl Piotrovsky [directeur du musée de l'Ermitage] la souhaite ». Si résistance il y a eu, c'est bien dans les rangs du musée, de certains conservateurs guère friands d'art contemporain, aux babouchkas revêches rescapées de l'ère soviétique, prenant un malin plaisir à ignorer les visiteurs désorientés dans le labyrinthe de l'Ermitage. « Les gens ne sont pas flexibles, il nous a…