Face aux tissus lituaniens traditionnels exposés à la Fondation Vasarely, l'évidence tombe. Tout d'abord, concernant l'influence qui a nourri dès son enfance le peintre Kazys Varnelis (1917-2010) – puisque sa mère est tisserande –, mais aussi concernant les frontières définitivement floues entre art et art textile – d'où l'importance d'avoir mis en avant le nom de tisserandes auteures de couvre-lits lorsque cela a été possible. Les motifs géométriques répétés font vibrer la rétine, danser l'œil et emportent l'esprit dans un espace infini, qu'ils soient en noir et blanc ou en couleur. Mais pour un artiste lituanien né après l’effondrement de l’empire russe en 1917, les arts traditionnels et populaires n'ont rien d'anecdotique. Après s'être libéré du joug de Moscou, qui interdisait la langue lituanienne et avait mené une politique de russification (entendant assimiler totalement les Lituaniens et leur culture), les arts populaires sont un des piliers pour affirmer l'identité de la nouvelle république. On ne peut donc pas se limiter à une compréhension formelle de ces tissus, même si l'artiste s'éloigne de cette dimension politique. « Cette double exposition présente non seulement les œuvres de Kazys Varnelis et leur contexte formateur, mais nous incite également à envisager, au-delà des limites historiques assignées à l’art optique, la dimension universelle de l’abstraction géométrique comme un phénomène artistique qui continue d’inspirer les nouvelles générations d’artistes », écrit le fils de l'artiste dans le catalogue. Cette relecture est complétée par une installation sonore de Matas Samulionis qui s'inspire des sons des métiers à tisser. Pour attiser tous les sens.
« L'op ethnographique », jusqu'au 19 janvier 2025, Fondation Vasarely – Centre architectonique, Jas de Bouffan, 13090 Aix-en-Provence
fondationvasarely.org