Fondée en 1924, elle est la doyenne des galeries d'art en activité à Paris. Alors que le timon passe à la quatrième génération, représentée par ses arrière-petit-neveux Édouard et Gabrielle, la figure de Katia Granoff (1895-1989) reste une source d'inspiration fondamentale. Née près de Kherson, dans l'actuelle Ukraine, elle fait ses études en Suisse et s'installe en France sans connaître les affres de la Révolution russe. Secrétaire du Salon des Tuileries, elle décide d'ouvrir sa propre galerie, qu'elle installe en 1931 quai de Conti, où elle est toujours (avec la parenthèse de la spoliation sous l'Occupation et d'une seconde adresse place Beauvau), qu'elle doublera d'une antenne à Honfleur. Proche de Chagall, qu'elle expose dès le début, elle s'intéresse aussi à Friesz, Derain, Foujita, Fougeron et, véritable coup d'éclat, elle est la première à percevoir la valeur des Nymphéas de Monet, dont personne ne veut dans les années 1950 ! Par l'intermédiaire de Michel, le fils de l'artiste, elle en achète plus de 50, qui dorment encore dans l'atelier... Parallèlement, elle suit de près la création au féminin, montrant Chana Orloff, Françoise Gilot ou Martine Martine, ainsi que des artistes qui ont moins bien passé l'épreuve du temps, comme Thérèse Debains ou Émilie Charmy. L'exposition qui ouvre ce soir leur est consacrée, ainsi qu'à leurs homologues actuelles. Sur son temps libre, Katia Granoff écrit ses mémoires (Histoire d'une galerie) et des poèmes, et se fait aussi passeuse de la poésie russe : son anthologie (publiée chez Gallimard en 1961, ressortie chez Christian Bourgois en 1974 et 1987) présente 85 auteurs, de Nikolaï Asseïev à Marina Tsvetaïeva. Encensée par Malraux, Troyat et Bachelard, elle mérite une réédition !
« Espoirs et certitudes », du 12 septembre au 5 octobre, à la galerie Larock-Granoff, 13 quai de Conti, 75006 Paris.