Depuis une quinzaine d'années, une expression est apparue : celle de « méga-galerie ». Ces enseignes américaines et européennes ont connu une croissance spectaculaire en s’installant aux quatre coins du globe. Si leurs implantations correspondent à des stratégies marchandes – le dernier rapport Art Basel/UBS indique que le marché global de l’art est d’abord généré aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Chine puis en France –, elles ont de fait conduit à l’élargissement des équipes. Et pour maintenir leur compétitivité, il leur a fallu développer une politique de valorisation toujours plus efficace de leurs artistes. Le recrutement d’un ou d’une curatrice – parfois doublée d’un profil d’historienne de l’art – est alors devenu crucial. Véritable caution scientifique, le curateur apparaît essentiel dans l’accompagnement des artistes et le développement de leur carrière, tandis que sa compréhension fine de l’écosystème artistique conforte les acheteurs dans la validité de leur investissement.
Le rôle du curateur consiste d’abord à créer du contenu : expositions, publications, magazines, podcasts, symposiums, etc. Selon la taille de la galerie, c’est toute une gamme de médiums qui accompagnent les politiques de communication et de vente. Dans les galeries de taille moyenne, il est courant que le curateur soit responsable des ventes, sans que cela soit une contradiction. Profils rassurants, professionnels aguerris, les récentes recrues montrent une variété de personnalités, allant du mid-career curateur-influenceur au curateur-senior d’excellence. Mais avant tout, c’est la singularité de leur expertise tout comme leur réseau qui sont recherchés. En témoigne le recrutement en 2021 chez Gagosian New York de l’Américain Antwaun Sargent, alors âgé de 32 ans. En qualité de directeur, il continue à promouvoir, comme il le faisait précédemment en tant que critique d'art, les artistes noirs dont certains sont depuis représentés par la galerie.