Ces corps féminins nus et souffrants, accroupis ou contorsionnés, inspirés par les toiles expressionnistes de Max Beckmann, sont devenus le motif de l’œuvre de Juanita McNeely. Disparue en octobre dernier à 87 ans (voir QDA du 1er novembre 2023), la peintre américaine se trouve à l’honneur chez James Fuentes, qui l’a exposée à Los Angeles, et chez Natalie Seroussi, qui présente ses toiles aux côtés de Francis Picabia, Jean Arp, Pierre Klossowski et Louise Bourgeois. « "Venus Unchained" replace Juanita McNeely dans l’histoire de l’art, celle de la montée en puissance d’un "female gaze" », souligne Julien Seroussi. La peinture de McNeely témoigne en effet d’un regard féminin qui s’autonomise et représente sans tabou, dans des tons rougeoyants et violacés, les hémorragies menstruelles (Red Velvet), le cancer ou l’avortement clandestin que subit l’artiste avant la loi de 1973. « Le sang était très naturel pour moi. Le rendre réel, c’était en quelque sorte le faire disparaître », révélait l’artiste. « Juanita a participé au combat esthétique pour le droit des femmes à dessiner leur propre corps, qui a la même importance que le combat juridique pour le droit des femmes à décider de leur propre corps », contextualise le galeriste. Un corps libéré des jougs et de l’apesanteur, dans des carrousels tournoyants (Freedom?), qui défie le destin cruel de McNeely, devenue paraplégique en 1981 après un accident (Feet Moving). « J’avais des jambes, je voulais montrer mes jambes. Je ne pouvais plus les utiliser mais je les avais », rappelait-elle.
Juanita McNeely, « Venus Unchained », galerie Natalie Seroussi, 34 rue de Seine, 75006 Paris, jusqu’au 15 janvier.
natalieseroussi.com