Le Quotidien de l'Art

États-Unis : la culture face au repli réactionnaire

États-Unis : la culture face au repli réactionnaire
Vue de l’exposition « Unconditional Care: Listening to People's Health Needs » au Rochester Contemporary Art Center en septembre 2023.
© Facebook / Rochester Contemporary Art Center.

La présidence de Donald Trump (2017-2021) a initié aux États-Unis un vaste élan réactionnaire, faisant reculer les droits, notamment des femmes et des personnes LGBT. Avec pour conséquence d'altérer directement la création et les artistes confrontés à la censure. 

« Au début de l'année, plusieurs œuvres d'art ont été attaquées parce qu'elles étaient perçues comme soutenant des initiatives en faveur de la diversité, de Black Lives Matter ou de l'homosexualité », affirme Elizabeth Larison, directrice de la National Coalition Against Censorship (NCAC), une organisation qui soutient la liberté d'expression. Ainsi début 2023, une peinture murale située dans un espace public de la banlieue de Columbus (Ohio), montrant un enfant qui tient une pancarte « Black Lives Matter » et un autre un drapeau arc-en-ciel, a fait l'objet d'un débat sur la censure. Certains ont estimé que la fresque était trop clivante. Bien que de nombreux graffitis contenant des images similaires ne suscitent aucune controverse, ce cas est emblématique de la manière dont le paysage politique influence l'art visible dans l'espace public. 

En mars dernier, Katrina Majkut organisait au Lewis-Clark State College Center for Arts and History de Lewiston (Idaho) l'exposition « Unconditional Care: Listening to People's Health Needs » (présentée ensuite au Rochester Contemporary Art Center, État de New York), qui abordait diverses questions de santé publique. La curatrice avait décidé d'inclure « As I Sit Waiting », une série de sculptures de Lydia Nobles pour laquelle des femmes ont décrit leur expérience des soins liés à l'avortement ou à une grossesse menée de force à terme. Quelques jours avant le vernissage, l'université a demandé le retrait de quatre pièces de la série. Finalement, l'établissement a exclu de l'exposition six œuvres liées à l'avortement et à la santé reproductive, dont une de Michelle Hartney qui fait référence à la contraception et une autre de Katrina Majkut elle-même qui représente la mifépristone et le misoprostol, deux médicaments qui, pris ensemble, interrompent une grossesse. L'école déclara que ces œuvres étaient contraires au « No Public Funds for Abortion Act » de l'Idaho, une loi qui interdit l'utilisation de fonds publics pour promouvoir l'avortement, adoptée en 2021 – un an avant que la Cour suprême ne renverse l'arrêt « Roe v. Wade », permettant aux États fédéraux de rendre illégale l'interruption volontaire de grossesse. 

Avec le recul, Katrina Majkut maintient qu'en incluant ces œuvres, elle ne « défendait aucun service médical ni ne faisait la promotion de l'avortement. Je partageais des faits ou des expériences à ce sujet ». Pour elle, il s'agissait de créer un safe space pour réfléchir à une question qui fait partie intégrante de la vie d'une femme. En faisant intervenir la loi dans le contexte de cette exposition, l'école l'a accusée de contraindre des femmes à avorter. « Je ne pensais pas que la loi s'appliquait dans l'exposition, assure Katrina Majkut. Elle est censée empêcher l'avortement, mais elle a été rédigée de manière très vague et punitive. Ainsi peut-elle être interprétée de manière abusive et appliquée de…

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