En ce moment, les fans de David Cronenberg qui se rendront à Milan seront à la fête. Le cinéaste a été invité par la Fondazione Prada à donner sa vision de la Specola di Firenze, musée florentin à la collection de représentations anatomiques humaines hallucinante. C’est le deuxième opus d’un programme de mise en avant de collections de musées et institutions européennes, après la carte blanche donnée à Wes Anderson et Juman Malouf pour les collections du Kunsthistorisches Museum de Vienne en 2019. On y retrouve tout ce qui fait la singularité de la filmographie de Cronenberg, qui a réussi à instiller une savante dose de fascination et de malaise dans la présentation de ces objets en cire. Alignés dans leurs vitrines d’origine, les mannequins de cire, très réalistes, sont faiblement éclairés par de gros blocs lumineux en inox, plongeant le spectateur dans une ambiance de bloc opératoire de clinique futuriste. Surgissent de la pénombre savamment travaillée des corps éventrés, viscères exposés pour mieux comprendre le corps humain. Ces éléments créés au XIXe siècle à des fins d’éducation deviennent ici sujet de voyeurisme. Ce même voyeurisme se ressent dans la courte vidéo diffusée au début de l’exposition et réalisée par Cronenberg. Les gros plans sur les corps et visages cireux, flottant dans une ambiance de vacances, emmène le spectateur vers une interprétation hédoniste et esthétique de ces objets scientifiques singuliers. En moins de 4 minutes, le cinéaste réussit l’exploit d’un condensé de toutes ses obsessions artistiques.
« Cere anatomiche », jusqu’au 17 juillet 2023, Fondazione Prada, Largo Isarco 2, Milan
fondazioneprada.org