Vuitton x Kusama : une campagne publicitaire qui interroge

Depuis le 6 janvier, dans la vitrine de la boutique Louis Vuitton place Vendôme, à Paris, l'artiste Yayoi Kusama peint des pois jaunes. Au même moment, elle fait pareil de l'autre côté de l'Atlantique, dans le magasin Vuitton de la Cinquième Avenue à New York. Et aussi à Londres, chez Harrods. Comment est-ce possible ? Plus vraies que nature, ces versions de l'artiste sont des robots qui, le temps de la promotion de la collaboration entre l'artiste japonaise représentée par la galerie David Zwirner et la marque de luxe (propriété de LVMH), continuent leur tâche répétitive. Au sommet de la boutique des Champs-Élysées, c'est la figure géante de l'artiste qui émerge, façon Godzilla. Pour la campagne de communication de la deuxième collaboration entre Vuitton et Kusama, l'enseigne a vu grand. Et cela semble fonctionner, eu égard au déferlement d'images sur les réseaux sociaux. Pourtant dans le milieu de l'art, des interrogations pointent : « Je pensais qu'avec un projet international de cette ampleur, il y aurait une déclaration publique de l'artiste, même trois mots : "Je suis excitée", écrit sur son compte Instagram Jerry Gogosian, artiste publiant des mèmes mordants sur le milieu de l'art, suivie par 120 000 followers. Je ne trouve rien de la part de Kusama. Seulement de Louis Vuitton et de la part de la vague "équipe" [de l'artiste] ». À 93 ans, Yayoi Kusama est l'artiste femme dont les œuvres ont rapporté le plus aux enchères (889 millions de dollars avec près de 8 000 lots vendus). C'est également elle qui a, selon le Wall Street Journal, « la plus longue période de vie volontaire dans un hôpital psychiatrique » : elle réside depuis 1977 dans un établissement de Tokyo. Le site internet de l'artiste est géré par une société intitulée Yayoi Kusama Inc. Celle-ci n'a pas répondu à nos demandes de commentaire, tandis que Louis Vuitton nous a fait parvenir un entretien dans lequel Yayoi Kusama affirme : « Tout ce que j'ai créé jusqu'à présent vient de mon âme ». Un entretien semble-t-il daté, puisque l'artiste y explique être en train de travailler à une nouvelle série, EVERY DAY I PRAY FOR LOVE, laquelle date de 2019.