Le rayon vert, lueur éphémère visible au moment du coucher du soleil, poétisée par Eric Rohmer dans son film éponyme de 1986, offrirait selon le cinéaste la possibilité à ceux qui le contemplent de lire dans leurs sentiments et dans ceux des autres. À Strasbourg, un autre type de rayon vert, révélé par le passage de la lumière à travers l'un des vitraux de la cathédrale Notre-Dame, pouvait être observé à chaque équinoxe, (le 20 ou 21 mars à 11h38, cette année le 20, et le 22 ou 23 septembre à 12h24). En traversant précisément la chaussure gauche de Juda, fils de Jacob, il illuminait d'émeraude un dais de pierre surplombant le Christ de la chaire. Mais ce phénomène optique n'est plus depuis le 16 mars dernier, date du remplacement d'une partie du vitrail daté de 1876, à l'occasion de travaux de restauration de la verrière sud, réalisés par la Direction régionale des affaires culturelles du Grand Est. Le bleu et le jaune font désormais place au verre transparent, au grand dam des admirateurs, qui pour certains se rendaient chaque année sur place photographier le fameux rayon, visible pendant quelques minutes seulement. Il avait été découvert en 1972 par l'ingénieur-géomètre Maurice Rosart, peu de temps après une première restauration. Ce dernier a fait part de son mécontentement dans un courrier transmis à l'AFP, dans lequel il déplore « un mauvais coup porté aux Strasbourgeois, à la culture, à la laïcité, aux Lumières ». Le clergé avait de son côté toujours balayé d'un revers de main les théories ésotériques, laissant pourtant rêveurs beaucoup de curieux... qui devront désormais se contenter du rayon vert des bords de mer.
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