« Une boule de bois marquée d’un creux féminin est suspendue, par une fine corde à violon, au-dessus d’un croissant dont une arête effleure la cavité », ainsi Dalí décrit-il dans la revue Le Surréalisme au service de la révolution (SASDLR) la première sculpture en bois de Giacometti. Sa présentation en 1930 à la galerie Pierre lui vaudra la reconnaissance artistique et leur rencontre. Quoique très courte (1930-1935), la période surréaliste de Giacometti est un moment charnière. Elle marque son ancrage officiel dans la scène parisienne et la réalisation des premières sculptures longiformes, dont la stature présage ces figures étrangement statiques et élancées qui deviendront sa marque de fabrique. Mais ce chemin vers le figuratif qu’emprunte Giacometti n’est pas du goût de ses pairs, qui prônent la suprématie d’une pensée abstraite, imagée et symbolique. Si « la rupture », ainsi que la nomment Breton et Giacometti, se fait officiellement en 1935, elle est avant tout professionnelle. Admiration et affection mutuelles les lient jusqu’à leurs décès respectifs, à quelques mois d’intervalle, en 1966. L’amitié véritable entre ces deux figures de l’avant-garde se découvre au fil de L’air de l’eau, manuscrit original écrit par Breton et illustré par Giacometti, de portraits d’eux signés Victor Brauner ou Man Ray, mais aussi de lettres, entre les lignes desquelles se lit au mieux la force de leur lien : « Très cher Enfant et Ami, Tu sais bien que tu es le personnage qui me manque le plus. Quand tu n’es pas là, il n’y a plus ni jeunesse, ni clarté, ni jeu, ni certitude sur le plan intellectuel sans compter que si ce n’est pas toi qu’on attend le soir au café, c’est peut-être bien qu’on n’attend personne. De tout cœur à toi, André B. ».
« Giacometti / Breton, Amitiés surréalistes » à l'Institut Giacometti jusqu'au 10 avril, fondation-giacometti.fr