Dans la tentative de contrer le processus d’accélération permanent, que même la pandémie a du mal à endiguer, la Fondation Memmo a eu un rôle pionnier. « Plutôt que d’inviter les artistes à travailler sur Rome, elle les invite à travailler avec Rome », précise son directeur artistique, Francesco Stocchi (par ailleurs conservateur d’art moderne et contemporain au Boijmans de Rotterdam). Ceux-ci sont donc incités à résider mais aussi à venir et revenir. « C’est en retournant qu’on arrive à se protéger des images rhétoriques, des clichés ». Après Camille Henrot ou Kerstin Brätsch, Oscar Murillo (prix Turner 2019) a joué le jeu, malgré les entraves aux déplacements. Son installation, qui peut être lue comme une ode au recyclage permanent, a été conçue entre Rome – où il a notamment réalisé de grandes peintures dans un raptus nocturne – et son atelier colombien de la Paila. D’anciens bancs d’église chinés dans des brocantes, des toiles noires de goudron provenant de la Biennale de Venise, un tableau pompier de Sartorio, artiste bien oublié, des boulettes d’argile et de farine de maïs, mortier pauvre et réutilisable… Une sorte d’assemblage à la Lautréamont, une critique en creux de notre société du gaspillage, une invitation à réfléchir aux nouvelles vies possibles des matériaux.
« Oscar Murillo, Spirits and Gestures », jusqu’au 20 mars 2022, à la Fondation Memmo, via Fontanella Borghese 56/b, Rome
fondazionememmo.it