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Les foires rechignent à baisser leurs tarifs

Les foires rechignent à baisser leurs tarifs
Le Grand Palais Éphémère sur le Champs de mars, Paris.
© Patrick Tourneboeuf/RMN_GP/Tendance Floue.

La nouvelle est tombée le 19 mai : TEFAF Maastricht, qui devait avoir lieu en septembre, est annulée, pour ne garder qu'une édition en ligne. Malgré la pandémie qui freine toujours les déplacements internationaux, rares sont les foires à réduire leur tarification, au grand dam des syndicats de galeries.

La pandémie de Covid-19 fera-t-elle fait baisser le prix du mètre carré loué aux galeries dans les salons ? C’était le souhait du Comité professionnel des galeries d’art (CPGA), qui en septembre 2020 avait demandé à la FIAC, Paris Photo et Art Paris Art Fair de moduler leurs tarifs ou le cas échéant de clarifier dans les contrats leurs conditions d’annulation et de report. C’est aussi l’objectif de la Fédération européenne des galeries d’art (FEAGA), qui, dans une lettre ouverte, appelle les foires à « entamer un débat visant tant à diminuer temporairement les prix de location des stands et de l’ensemble des prestations afférentes à celui-ci qu’à réfléchir aux développements postérieurs à la pandémie ». Car, poursuit ce courrier, « il est probable, dans une hypothèse de retour sanitaire à la normale, que deux années au minimum seront nécessaires à un rétablissement du marché tel que nous le connaissions avant la crise ». Quoique les premières foires « en réel », comme Frieze à New York, aient envoyé des signaux encourageants au marché, le public reste majoritairement local en raison des restrictions de déplacement, dont les levées restent liées à l’évolution du contexte sanitaire dans le monde. D’après le rapport Art Basel UBS publié en mars dernier, seuls 54 % des collectionneurs interrogés sont prêts à se rendre à des foires à l’étranger.

L’incertitude est telle que TEFAF à Maastricht a annulé le 19 mai son édition de septembre, proposant une simple version en ligne au coût de 2500 euros. Quelques semaines plus tôt, le mastodonte néerlandais n’avait toutefois pas hésité à augmenter ses tarifs, de 11 500 euros à 13 500 euros, sa directrice, Charlotte van Leerdam, nous assurant avoir « une communauté de marchands plus préoccupés par le fait de maintenir les standards de TEFAF que de baisser les prix ».  

Des prix stables

La nouvelle arrivée sur l’échiquier Ex.Paris n’a guère allégé les prix pratiqués par la Biennale Paris dont elle prend le relais, maintenant une tarification onéreuse de 1100 à 1900 euros HT le mètre carré. « Mais l’offre de EX.Paris inclut un stand clé en main avec une plus grande qualité de services : qualité des structures, des décors proposés et de l’accompagnement, sans dépense complémentaire hormis l’éclairage », se défend Alexis Cassin, initiateur de l’événement.

Chez Art Paris Art Fair, qui avait accordé en 2020 une remise de 15 % sur le prix du stand aux exposants ayant consenti à participer à l’édition reportée en septembre, les prix ne bougent pas, de l’ordre de 585 euros HT pour le secteur général. « Le Grand Palais éphémère est loué au même prix que le Grand Palais historique », justifie Guillaume Piens, directeur de la foire qui sera la première à occuper l’édifice. Et d’ajouter : « Il ne s’agit pas d’une tente mais d’une structure temporaire en dur luxueuse implantée au cœur de Paris, dans l’un des plus beaux espaces de la capitale sur le Champ-de-Mars, entre l’École militaire et la Tour Eiffel. » 

À ceux qui s’étonnent que les foires n’aient guère révisé leur tarification nonobstant la pandémie, Guillaume Piens rétorque que 40 % du prix du mètre carré est englouti par la location du lieu et l’installation technique générale. « En tant qu’organisateur de salon je n’ai jamais gagné d’argent faute de pouvoir bénéficier d’une économie d’échelle et je ne suis pas trop cher par rapport au service que j’offre », rebondit Stéphane Corréard, patron de la foire Galeristes, qui se tiendra en octobre au Carreau du Temple. Pour autant, il a remodelé son offre pour la rendre plus accessible, en baissant de 10 % ses tarifs. « J’ai voulu symboliquement passer le ticket entrée à 9500 euros contre 10 000 euros car j’entends bien les demandes des exposants », confie-t-il, précisant toutefois qu’« une foire est rarement rentable à court terme pour un exposant ».

Travail d'équilibriste

Ailleurs, la baisse est d’ordre homéopathique. Voire purement symbolique chez Fine Arts Paris, qui passe de 1200 euros à 1150 euros le m2. « Notre marge de manœuvre reste limitée dans la mesure où les charges continuent à croitre », justifie Hélène Mouradian, directrice de l’Agence d’évènements culturels, qui gère le Salon du dessin et Fine Arts Paris, invoquant « un travail d’équilibriste et une prise de risque permanente ». Si les tarifs n’ont guère changé au Salon du Livre rare, qui se tient aussi en novembre, au Grand Palais éphémère, sa déléguée générale Anne-Marie Coulon affirme qu’« il est important d’être à l’écoute des exposants, pour lesquels la participation à des salons, en cette période d’incertitude, représente un engagement et un soutien auxquels l’organisateur se doit de répondre ». À défaut d’une baisse des prix, la plupart des événements autorisent des facilités de paiement. Fine Arts Paris laisse à ses exposants jusqu’au 30 août pour s’acquitter de l’acompte de 3000 euros pour la réservation d’un stand. Les exposants du Salon du livre rare pourront effectuer leurs règlements en maximum quatre échelonnements.

À rebours de leurs collègues, les organisateurs de Drawing Now ont opté en juin prochain pour un format alternatif plus modeste que celui habituel au Carreau du Temple. L’accès au salon, qui se tient pour l’occasion dans un ancien grand magasin du Faubourg Saint-Antoine, est gratuit pour les visiteurs. Pour les exposants, la baisse des prix est significative : 240-270 euros HT le m2 au lieu de 285-365 euros. « Nous ne voulions pas que les gens sentent un couteau sous la gorge », précise Carine Tissot, directrice de la foire, précisant que « sur cette édition nous faisons 160 000 euros de chiffre d’affaire, ce qui couvre juste les frais ». L’idée étant d’avoir un événement simple, festif et suffisamment attractif pour permettre aux galeries de reprendre du collier sans douleur.

Guillaume Piens.
Guillaume Piens.
© Chiara Santarelli.
Le stand de la galerie Perrotin à Art Paris 2020.
Le stand de la galerie Perrotin à Art Paris 2020.
© Art Paris Art Fair 2021.
Edition 2020 du Salon International du Livre rare et des experts en objets d’art.
Edition 2020 du Salon International du Livre rare et des experts en objets d’art.
© François Benedetti.
Edition 2020 du Salon International du Livre rare et des experts en objets d’art.
Edition 2020 du Salon International du Livre rare et des experts en objets d’art.
© François Benedetti.
Carine Tissot.
Carine Tissot.
© Olivier Lechat.
Le nouvel espace du salon Drawing Now, au 42 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris.
Le nouvel espace du salon Drawing Now, au 42 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris.
Courtesy Drawing Now.
Le nouvel espace du salon Drawing Now, au 42 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris.
Le nouvel espace du salon Drawing Now, au 42 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris.
Courtesy Drawing Now.
Vue de l'édition 2019 du salon Drawing Now.
Vue de l'édition 2019 du salon Drawing Now.
© Emmanuel Nguyen Ngoc.
Tefaf Maastricht 2020.
Tefaf Maastricht 2020.
© TEFAF.

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