Le Quotidien de l'Art

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État de chaise

État de chaise

Staline et de Gaulle ont, à des occasions différentes – au Conseil de sécurité de l'ONU ou devant la CEE – utilisé efficacement la diplomatie de la chaise vide. Les quarante audacieuses qui se sont réunies hier devant l'ambassade turque à Paris ont choisi la politique de la chaise occupée. Il s'agissait évidemment de s'insurger contre le récent camouflet d'Ankara, qui a fait d'une pierre deux coups – bafouer à la fois l'Europe et les femmes. Lors d'une rencontre bilatérale le 6 avril, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait dû se contenter d'un canapé d'appoint tandis qu'Erdogan, toujours plus à l'aise dans ses habits de pacha, n'avait concédé un fauteuil-trône qu'à son homologue masculin Charles Michel, président du Conseil européen. À l'origine du sit-in original d'hier à midi, avenue de Lamballe, lancé sous le hashtag « Une chaise pour Ursula », des personnalités du monde de l'art, collectionneuses ou galeristes comme Sandra Hegedüs et Maria Lund. « Nous ne pouvions pas laisser passer, c'était trop grave, il était nécessaire de faire quelque chose – pacifiquement bien sûr. S'il n'y a pas de chaise en Turquie pour Ursula, alors nous l'apportons », explique Sandra Hegedüs. Après la casserole argentine et le parapluie de Hong Kong, la chaise, nouveau symbole de résistance ? Un choix judicieux quand on se rappelle que l'Empire ottoman, dont Erdogan se considère l'héritier naturel, était connu sous le nom du Divan. À armes presque égales...

Article issu de l'édition N°2146