Plombée par d’importantes pertes financières au premier semestre 2020, des changements de gouvernance et la chute de ses cours boursiers, la Société Générale annonçait en novembre 2020 la suppression de 640 postes en France. Ces secousses n’ont pour autant pas empêché le groupe au logo rouge et noir de poursuivre sa collection, en préservant son budget d’acquisition de 300 000 euros. Tout juste la banque a-t-elle réorienté cette enveloppe vers de plus jeunes artistes, en lançant un appel à projets en partenariat avec l’École des Beaux-Arts de Paris. « On s’est dit que cette année, il fallait une attention particulière aux jeunes artistes car la crise va s’installer dans la durée », explique Hafida Guenfoud-Duval, sa directrice marque et mécénat, précisant « qu’il ne s’agit pas d’un acte de solidarité, les artistes sélectionnés ayant pleinement leur place dans notre collection ». À l’instar de la Société Générale, 78 % des 56 membres de l’IACCCA (Association of corporate collections of contemporary art) ont poursuivi leurs acquisitions depuis la pandémie. Seuls 50 % ont réduit leur budget. Pour l’heure une seule grande entreprise, la compagnie aérienne British Airways, qui a annoncé l’été dernier la suppression de plus d’un quart de ses effectifs, a choisi de se défaire de plusieurs trophées de Damien Hirst, Peter Doig et Bridget Riley.
Tenter le maintien
À l’instar de nombreux gestionnaires d’actifs français, Édouard Carmignac a essuyé 2 milliards de décollecte de janvier à mars 2020 selon le quotidien Les Échos. La collection de la Fondation Carmignac n’en a pas moins continué à croître « au même rythme que l’année dernière », précise une porte-parole. Quatre oeuvres ont ainsi été achetées dont une peinture récente de Rashid Johnson, Anxious red painting, en lien avec la pandémie, ainsi qu’une œuvre de Sigmar Polke, Bikini-Frauen, datée de 2004. « Les œuvres ont été achetées en ligne suite à une veille et un suivi de ces artistes déjà présents (pour les ¾ d’entre eux) dans la collection et dont la Fondation suit le travail attentivement », explique-t-on à la Fondation Carmignac, qui garde espoir de « continuer en 2021 à acquérir des œuvres qui ont du sens : soit en lien avec les bouleversements de notre époque, soit avec les thématiques de nos expositions à Porquerolles ». Le fonds de dotation Rubis Mécénat a également maintenu sa politique d’acquisition connectée à son programme socio-culturel. En 2020, le groupe pétrolier a acheté pour 50 000 euros des oeuvres de Joël Andrianomearisoa et Laureline Galliot. « On travaille sur un budget prévisionnel annuel, mais comme l’ensemble n’a pas été utilisé, on a voulu faire un geste envers un troisième artiste », précise Lorraine Gobin, directrice du fonds de dotation. Du côté de Lab’Bel, fonds de dotation du groupe fromager Bel qui, fin septembre, enregistrait une croissance de 3,5 %, seules deux oeuvres ont été achetées en 2020. En cause « un manque de transparence sur notre budget pour des raisons de gestion interne », indique son directeur Laurent Fiévet, mais, précise-t-il, la dotation de 60 000 euros n’a pas fléchi en 2020. En novembre prochain, le groupe Bel, qui fête les 100 ans de la Vache qui rit, devrait orienter ses acquisitions vers les artistes qui ont déjà collaboré à ses boîtes collector.