Le Quotidien de l'Art

Marché

La FIAC s'emballe

Marguerite Humeau, Seated Lady of Çatalhöyük, A 40-year-old female human has ingested the brain of a hedgehog, 2018, bronze, sur le stand de la galerie CLEARING, New York, Bruxelles.
Marguerite Humeau, Seated Lady of Çatalhöyük, A 40-year-old female human has ingested the brain of a hedgehog, 2018, bronze, sur le stand de la galerie CLEARING, New York, Bruxelles.
Photo Marine Vazzoler.
Ouattara Watts, Door of the Cosmos 2, 2018, sur le stand de la galerie Cécile Fakhoury, Abidjan.
Ouattara Watts, Door of the Cosmos 2, 2018, sur le stand de la galerie Cécile Fakhoury, Abidjan.
Photo Marine Vazzoler.
Vue du stand de la galerie David Zwirner avec des œuvres de Wolfgang Tillmans.
Vue du stand de la galerie David Zwirner avec des œuvres de Wolfgang Tillmans.
Photo Marine Vazzoler.
Antonio Obá, Aparição, à la galerie Mendes Wood.
Antonio Obá, Aparição, à la galerie Mendes Wood.
Photo Renato Ghiazza/Courtesy Mendes Wood DM São Paulo, Brussels & New York.

Les premières heures de la FIAC ont montré un grand dynamisme marchand, même si toutes les galeries n'avaient pas encore fait florès. 

Lors du vernissage VIP de la FIAC, mercredi 16 octobre, se pressait un public plus international que jamais. L'affluence était massive dès 14h, et les allées noires de monde. L’équipe de la Fondation Vuitton au grand complet était là, ainsi que Delphine Arnault et Xavier Niel, accompagnés du conseiller Hervé Mikaeloff. Tous les grands conseillers américains étaient également présents, à l’instar d’Allan Schwartzman, Ashley Carr et Suzanne Modica. Les politiques venaient aussi battre la campagne, comme Dominique de Villepin ou Benjamin Griveaux, candidat LRM à la mairie de Paris, qui s’est longtemps attardé sur le stand de kamel mennour.

Dès la première heure de la foire, la galerie Ceysson Bénétière a vendu une œuvre de 1967 de Patrick Saytour, tandis que la Galleria Continua a cédé une grande œuvre de Yoan Capote à une collection brésilienne. La Pace Gallery a négocié quatre œuvres de Sam Gilliam à des Européens, cédé pour 100 000 dollars une œuvre ambiguë de Loie Hollowell et pour 1,6 million de dollars un Rauschenberg. De son côté, la galerie Thaddaeus Ropac s'est défait d'une autre œuvre de l'artiste américain, Everglade (Borealis) (1990) pour 1,7 million de dollars. Mendes Wood faisait sold out avec son solo show d’Antonio Obá, tout comme David Kordansky avec les œuvres sur papier de Jennifer Guidi. Waddington Custot a vendu dès les premières heures un Nicolas de Staël à 1,45 million de dollars et une pièce de Fabienne Verdier à 150 000 euros.

À l'approche du Brexit, de nombreux galeristes commentaient la comparaison entre Paris et Londres. « Paris revient en force et devient incontournable, confie Marc Payot, directeur de Hauser & Wirth, qui a cédé une œuvre de Louise Bourgeois de 2008 pour 1,7 million de dollars. Cela fait sept ans qu’on regarde Paris. Mais on est à Londres à long terme. Pour nous ça n’est pas Paris ou Londres, mais plutôt tandem. » Paris pourrait toutefois devenir une base intéressante pour la galerie, d’autant que la quasi totalité des œuvres de Mark Bradford exposées actuellement à Londres a été vendue à des Européens. Max Hetzler a écoulé autant des pièces de Charles Gaines (à une fondation suisse) que des œuvres de Rebecca Warren ou Albert Oehlen. « Nous avons eu beaucoup plus de demandes qu’à Frieze pour des œuvres importantes à 400 000 euros. On sent à la FIAC une vraie pêche, les gens n’ont pas peur de dépenser des sommes importantes », commente Samia Saoma, sa directrice. « Je n’ai jamais vu une telle qualité de collectionneurs venant d’Asie », confie Niklas Svennung, co-directeur de la galerie Crousel, qui a cédé cinq œuvres de Mona Hatoum, Gabriel Orozco et David Douard à une fondation qui ouvrira ses portes dans cinq ans à Taipei. Chez Zwirner, Victoire de Pourtalès saluait « la grande qualité de la foire par rapport aux éditions précédentes » et annonçait des ventes de Sherrie Levine, Wolfgang Tillmans et Lucas Arruda, tandis que sur le stand d'Almine Rech (avec Farah Atassi, Tursic & Mille, Tabouret, Wesselmann...) se pressaient « beaucoup de Français et des collectionneurs américains qui reviennent ».

Un début prometteur

Mais toutes les galeries n’ont pas démarré sur les chapeaux de roue. « Nous avions fait un meilleur début l’an dernier sur de plus hauts niveaux de prix. En revanche on a vu beaucoup plus de nouveaux visages internationaux », commente Sandrine Djerouet, directrice de Jocelyn Wolff. Même constat chez Marcelle Alix, dont la co-directrice Isabelle Alfonsi explique que « malgré l'efferverscence et le monde incroyable présent dès mercredi, les gens ne se précipitent pas pour acheter ». Située à une place de choix dans le Salon d'honneur, la galerie Clearing avoue quant à elle que venir à la FIAC est l'un des seuls moyens pour capter les collectionneurs français. Le stand présente une belle sélection d'artistes hexagonaux (Lili Reynaud-Dewar, Dewar et Gicquel, Marguerite Humeau, dont une petite sculpture est partie à 53 000 euros), pensée au regard de l'actualité culturelle française. Jeudi matin, le constat était cependant sans appel : « Les Français achètent peu. » Affirmation inverse à la galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois, où les acheteurs locaux ont fait des acquisitions, notamment Lucie Picandet et Alain Bublex.

« C’était mieux que ce que le début laissait présager », confie quant à lui Christophe Gaillard, qui a cédé cinq œuvres d’Hélène Delprat entre 15 000 et 32 000 euros. Pour sa première participation, la galeriste Barbara Wien ne cache pas son étonnement : « Je suis épatée de l'intérêt et de l'érudition des visiteurs. Notre but n'est pas de vendre tout le stand le plus rapidement possible, nous voulons simplement que les œuvres arrivent là où elles doivent être ». Habituée de Frieze, elle a décidé de participer à la FIAC en apprenant qu'Éric Baudelaire, qui présente son installation Where are you going (2018), était sélectionné pour le prix Marcel Duchamp. Un peu plus loin, Cécile Fakhoury se disait satisfaite de l'accueil réservé au solo show de Ouattara Watts. Oscillant entre 35 000 et 150 000 euros, les toiles du peintre ivoirien sont presque toutes parties. Chez Florence Loewy, on se félicitait de la vente des deux dernières éditions de Role Models de l'Américain William Wegman (5000 euros chacune) et d'une toile du même artiste, Color Television, partie à 18 000 euros. 

Article issu de l'édition Hors-série du 18 octobre 2019