Terrible équation arithmétique que celle des musées français : leurs budgets d’acquisition ont fondu tandis que les prix des œuvres n’ont cessé d’exploser. Aussi sont-ils plus tributaires que jamais des donations d’œuvres d’art. Impossible donc d’enrichir les collections publiques sans les largesses de donateurs privés. « Les donations sont pour nous un signe de bonne santé, une forme de reconnaissance », confie Hélène Lafont-Couturier, directrice du musée des Confluences, à Lyon. Les chiffres sont éloquents : le musée d’Art moderne de la Ville de Paris a bénéficié en 2018 de 46 dons, dont huit œuvres de Zao Wou-Ki par sa veuve, mais n’a pu effectuer que dix achats avec sa dotation annuelle de 400 000 euros. Au Centre Pompidou, qui dispose d’un budget d’acquisition annuel de 2 millions d’euros, les donations d'œuvres permettent de quadrupler, voire quintupler cette somme. Au Louvre, en 2018, ce sont près de 40 % des pièces nouvellement entrées au musée (soit 41), qui ont été données, pour une valeur totale de 2 millions d’euros — une générosité favorisée par l’intermédiaire de la Société des Amis du Louvre (ainsi tout récemment pour la toile David jouant de la harpe pour le roi Saül du baron Gros) et des American Friends of the Louvre. La collection d’art africain et océanien, constituée en une décennie par Marc Ladreit de Lacharrière et donnée en 2016 au musée du quai Branly, a été évaluée autour de 50 millions d’euros, soit l’équivalent de 25 fois le budget d’acquisition du musée en 2018. Au musée des Beaux-Arts de Lyon, sa directrice Sylvie Ramond témoigne : « Notre budget d’acquisition est de 200 000 euros par an en moyenne. La part des donations a beaucoup augmenté et concerne tous les domaines, mais plus particulièrement l’art du XIXe siècle, moderne et contemporain, et beaucoup d'objets d'art. Ainsi, en 2018, le musée a fait trois achats importants (un carton d'Hippolyte Flandrin, une sculpture d'Erik Dietman, une glace art Nouveau) et a reçu environ 150 donations ! »
Le profil-type du donateur ? « Les collectionneurs bien sûr, précise Sylvie Ramond, mais aussi, notamment à l’occasion d’expositions, les artistes eux-mêmes (ainsi Bernar Venet l’an passé au musée des Beaux-Arts et au MAC) ou leur famille (récemment celles de Fred Deux et d'Étienne-Martin), les galeristes ou les membres de notre club de mécènes, le Cercle Poussin. Il y a une extraordinaire fidélité, comme celle du couple Meynet, qui a donné de nombreuses céramiques au musée (lire L’Hebdo du 16 février 2018, ndlr). Certains m’ont suivie depuis le musée Unterlinden de Colmar (dont Sylvie Ramond a été directrice de 1989 à 2004, ndlr). » Aux Confluences, Hélène Lafont-Couturier souligne : « La donation résulte souvent de la…