« La formation de philosophe et de juriste d’Éric Duyckaerts donnait lieu à des mises en scène des formes du savoir et d’autres jeux autour de l’art de disserter », selon l’historienne de l’art Patricia Brignone, soutien attentif dès ses débuts. Né en 1953 à Liège, où il a fait sa première performance en 1983, l’artiste est décédé en fin de semaine dernière à Bordeaux. Connu pour se représenter dans des vidéos et performances, Duyckaerts appartient à une génération marquée par l’Institut des hautes études en arts plastiques de Pontus Hulten. Enseignant inoubliable pour des générations d’artistes dans les écoles nationales (Bourges, Dijon et la Villa Arson à Nice), il conciliait un savoir encyclopédique et une « mise en dérision de l’arrogance de la pensée , se souvient l’artiste Arnaud Labelle-Rojoux. Pour Éric, l’art était une imposture, non pas dans le sens d’une arnaque, mais dans le principe qu’une compétence conduit à l’acquisition d’une posture. Il trouvait souvent lamentable le besoin de légitimation en s’accrochant aux citations de philosophes ». Héritier de l’esprit farceur de Jacques Lizène, artiste belge déjà collectionné par son père psychanalyste, Éric Duyckaerts disait : « Il ne faut pas croire que les idées viennent avant les formes ». Représentant de la Belgique à la Biennale de Venise en 2007, il a été associé à l’émergence des conférences-performances (à l’image de ses cours) et à la mouvance portée par Jean-Yves Jouannais autour de l’idiotie : une philosophie anti-idéaliste pour combattre un art faisant croire à la profondeur là où il n’y a que du sérieux.