Place aux femmes, aux homosexuels, aux transgenres ! Le mot d’ordre de la quatrième édition de la Biennale de Kochi-Muziris, dans l’État du Kerala, sonne comme une audace dans le contexte indien. Si la première édition de cette manifestation, en 2012, avait été critiquée pour avoir fait peu de cas des artistes femmes, celle qui s’est ouverte le 12 décembre, sous la houlette de l’artiste et militante Anita Dube, leur déroule le tapis rouge. Dans les bâtiments vétustes au charme décati, quelques stars internationales comme Marlene Dumas côtoient des consœurs engagées : l’Indienne Shilpa Gupta met en scène une ode aux poètes dissidents de toutes époques, tandis que la Mexicaine Mónica Mayer, inspirée par le mouvement #MeToo, a recueilli la parole de femmes violées dans le Kerala, qu’elle présente dans une installation glaçante composée de cartes accrochées à un fil par des pinces à linge. Ce woman power inédit fait naturellement écho à la rafale d’accusations de harcèlement sexuel mitraillée par le compte Instagram @herdsceneand (Scene and Herd). Dans le viseur, certaines figures du milieu de l’art indien. En octobre, le cofondateur et membre du conseil d’administration de la biennale, Riyas Komu, a été pressé de quitter ses fonctions. En novembre, c’était au tour de Gaurav Bhatia, responsable de Sotheby’s en Inde, de se mettre au vert. Le coup le plus dur fut porté le 11 décembre, lorsque Scene and Herd a accusé Subodh Gupta de harcèlement répété. Ce dernier — qui est à l’Inde ce que Damien Hirst est à la Grande-Bretagne — a dû se retirer du festival Serendipity, dont il était cette…
Biennale de Kochi : une réussite artistique et sociétale
En rupture avec les élites économique et politique indiennes, mais en osmose avec la société, la Biennale de Kochi propulse encore une fois le pays sur la scène de l’art contemporain. Ici, projets artistiques et engagements sociétaux font un tout. Analyse d’un succès.