Vendredi 7 décembre, chez Ader à Drouot, l’État a préempté 15 meubles créés par Robert Mallet-Stevens pour la villa Cavrois (Croix), pour un total de 323 840 euros, loin de l’estimation de 110 000 à 170 000 euros. Pour le Centre des monuments nationaux, c’est une nouvelle avancée dans le travail de fourmi qu’est le remeublement de ce chef-d’œuvre moderniste. « Ce mobilier fait partie d’une œuvre d’art totale, Mallet-Stevens a tout pensé de manière globale, du bâtiment au jardin. Et contrairement aux villas réalisées pour Paul Poiret ou Jacques Doucet, il a bénéficié de la latitude la plus large possible pour s’exprimer et d’un budget très important », rappelle Xavier Dominique, commissaire-priseur chez Ader. Construit en 1932 pour l’industriel Paul Cavrois, le bâtiment a connu une histoire tumultueuse. Laissé à l’abandon pendant plus d’une décennie, il est racheté par l’État en 2001 et rouvre ses portes en 2015, après une campagne de restauration de 12 ans. Quid du mobilier ? Après la mort de madame Cavrois, il est dispersé chez Sotheby’s, à Monaco, en 1987. « Les erreurs, approximations et fausses attributions jettent le discrédit sur l’ensemble de la vente qui est un échec commercial », rapporte Richard Klein dans son ouvrage Robert Mallet-Stevens, La Villa Cavrois (éd. Picard, 2005). De toute façon, le mobilier de Mallet-Stevens n’intéresse guère à l’époque : « Pendant très longtemps, on a montré peu d’intérêt pour le mobilier d’architecte, considéré comme fonctionnel », note Xavier Dominique. À la réouverture de la villa, seuls 32 meubles d’origine sont présentés. Depuis 2015, une politique ambitieuse de remeublement est mise en place par le CMN, avec l’aide du Fonds du patrimoine. Mais depuis les années 2000, la cote de Mallet-Stevens s’est envolée. En 2011, 7 pièces du boudoir sont préemptées chez Christie’s Paris pour 591 000 euros ; en 2015, 10 chaises et 2 tables sont acquises 232 500 euros chez Sotheby’s New York et un tabouret 36 000 euros chez Artcurial. Aujourd’hui, au sein du mobilier préempté à Drouot, figurent notamment une lampe (83 000 euros), une paire de bergères à oreilles (76 800 euros) ou une enfilade (64 000 euros). 16 des meubles avaient été acquis en 1987 par le même collectionneur et deux étaient passés par la galerie L’Arc en Seine. Le total de cette vente porte à plus de 1,2 million d’euros le total des meubles rachetés par l’État depuis la réouverture de la villa.
drouot.com