Un artiste phare de la fin des années 60 vient de disparaître à l’âge de 87 ans à New York. « Le contreplaqué est bon marché, standard et omniprésent, il n’était pas considéré comme un matériau d’art. Les outils pour le travailler étaient courants et faciles à trouver, l’habileté requise pour les manipuler peu exigeante ; la menuiserie est une compétence quotidienne dans le contexte urbain post-industriel », disait-il. Il avait signé, en 1966, une série de textes fondateurs de l’art minimal dans le magazine Artforum, avant de rejoindre la galerie de Léo Castelli. Marié à la chorégraphe Simone Forti au début des années 60, il s’installe à New York, où il est un pivot de la scène d’avant-garde, mélangeant théâtre, danse et cinéma, participant à la révolution esthétique menée par la Judson Church. L’un des éléments de décor, en contre-plaqué peint en gris, réalisé pour une performance en 1964, devient sa première sculpture minimale. Alimentant la controverse, il posera torse nu avec un casque nazi et des chaînes pour sa compagne et historienne de l’art Rosalind Krauss : le poster réalisé en 1974, inspiré de l’esthétique sadomasochiste et tournant en dérision la misogynie des artistes de l’art minimal, est resté célèbre. Au moment où la sensibilité artistique du début des années 80 s’est détournée de ses préceptes formalistes, il s’est engagé dans une réflexion sur la menace nucléaire. Son travail, qui s’est aussi étendu au land art, exprime une foi inébranlable : « Ce qui m’a toujours intéressé, c’est la recherche, la possibilité d’affirmer autant que de nier. L’art dans ses jeux irrationnels et l’intensité de ses émotions, dans son effroi et son cynisme, ses deuils et ses dérisions, sa colère et sa grâce, a témoigné d’un siècle sombre. »