Mardi dernier, au monastère de l’Escorial, une Crucifixion de Titien (1565), considérée comme un joyau de la couronne, s’est décrochée de la sacristie. L’imposante toile (242x137 cm) est tombée sur des caissons de Juan de Herrera (l’architecte du monastère), qui ont amorti le choc, avant de toucher le sol. Elle a été transférée à l'atelier de restauration du Palais royal. Aucune image des dégâts n'a été communiquée, mais le responsable du Patrimoine national, Alfredo Pérez de Armiñán, a expliqué qu’ils concernaient la partie inférieure du tableau, où s’est produite une déchirure en forme de sept. Il a annoncé que l’aide des spécialistes du Prado, dont l'atelier est considéré comme l'un des meilleurs au monde, serait sollicitée et a donné une interprétation étrange des causes de l’accident : « La toile a été accrochée au plâtre par des clous pendant de nombreuses années. Le plâtre faiblit et perd de sa force. Nous supposons que peu à peu, il s’est effrité sans que personne ne le remarque. » L’arrivée du tableau à l’Escorial date de Philippe II, mais on ignore le nombre d'emplacements qu’il a occupés à l'intérieur du bâtiment. Ce chef-d’œuvre de la dernière étape du Titien en est rarement sorti : au Kunsthistorisches de Vienne en 2007, à l’Accademia de Venise en 2008, au Quirinale à Rome en 2013 et au musée Thyssen-Bornemisza en 2017 pour l’exposition « La Renaissance à Venise ». Pour plusieurs experts, cela ne fait aucun doute : la réinstallation dans la sacristie après ce dernier prêt n'a pas été effectuée dans les bonnes conditions et c'est pourquoi elle s’est décrochée, sans qu’il y ait à incriminer l'âge du plâtre. Il reste à attendre le compte-rendu détaillé d’un événement malheureux qui met en cause la conservation du patrimoine espagnol.