« Juste avant de mourir, Henri Michaux m’a demandé de déchirer une partie de ses dessins, ceux qu’il trouvait trop figuratifs, qu’il avait copiés dans des catalogues de plantes ou d’animaux. » Celle qui parle est Micheline Phankim, proche amie de l’écrivain pendant plus de vingt ans, et qui est, depuis sa disparition en 1984 à l’âge de 85 ans, son exécutrice testamentaire et son ayant droit. Si elle a mis à la cheminée quelques feuilles, elle en a surtout conservé, et veille, depuis, sur cet héritage. Comme Max Brod pour Kafka, elle n’a pas tout à fait respecté ses instructions : c’est à elle en effet que l’on doit la publication de Michaux dans la Pléiade et en format de poche, ce qu’il avait formellement refusé de son vivant.
Le tournant mescalinien de 1955
La montagne Michaux est à deux versants : si la face « écrivain » est bien balisée désormais, l’exploration du côté « peintre » est encore en cours. L’exposition de Bilbao montre toute l’étendue de ce territoire. Depuis la révélation de 1925, provoquée par la vision de Klee et Max Ernst, jusqu’aux dernières feuilles des années 1980, Michaux a dessiné pendant plus d’un demi-siècle, avec un trait qui doit beaucoup à la…