Où en est le débat critique sur la peinture, au-delà du sempiternel constat que l’antagonisme entre figuration et abstraction a été dépassé ? Prenons le cas de la scène artistique allemande des années 1990 à Cologne, polarisée autour de l’artiste provocateur en chef Martin Kippenberger avec Albert Oehlen, Michael Krebber, Jutta Koether ou Merlin Carpenter, et leur dialogue avec des artistes américains (Mike Kelley, Christopher Wool, Mel Thompson ou John Miller) et ceux d’une autre bande plutôt proche de la « critique institutionnelle » de la galerie Nagel. La tension affleurait aussi dans les échanges entre la revue Texte zur Kunst et l’austère revue américaine October. Alors qu’elles étaient réunies pour un séminaire en 1998 à Berlin, le clash a éclaté entre la doctrine disciplinaire de Rosalind Krauss et consorts de la revue américaine et le penchant de plus en plus évident de la revue allemande d’Isabelle Graw pour les études culturelles, féministes et postcoloniales – « l’histoire de l’art est une prison », affirmait un de leurs célèbres textes. Cette tension est toujours à l’œuvre au sein même de la peinture : comment explorer la porosité de l’art avec le monde sans en reproduire ses conventions discursives ? De quelle façon la peinture peut se laisser contaminer tout en explorant les potentialités d’un langage spécifique ? L’artiste Corentin Canesson connaît bien ces artistes, ce débat, et…
Avec Corentin Canesson et Lola Gonzàlez, le Crédac s’interroge sur la place du collectif dans l’art
Deux magnifiques expositions personnelles au Crédac, à Ivry-sur-Seine, s’interrogent sur la place du collectif dans l’art. Il peut s’agir d’affinités électives en peinture et de l’inévitable citation picturale que Corentin Canesson trempe dans un univers inspiré de la camaraderie d’un groupe de musique. Ou de la réinvention d’une communauté hors du radar, que Lola Gonzàlez met en quête d’une vision collective.